Deuxième convoi du Réseau syndical international de solidarité et de luttes à Kryvyi Rih en Ukraine

Partagez cet article

Préparé durant de longs mois, le second convoi syndical international de solidarité aux Ukrainien⋅ne⋅s est arrivé le vendredi 30/09, 5 mois exactement après le premier convoi qui nous avait mené à Lviv, et après une livraison de fourgons par Solidaires et la CGT en juin, 7 mois après le début de la guerre en Ukraine. Sa construction n’aurait pas été possible sans la puissante implication du Réseau Syndical International de Solidarité et de Luttes (RSISL). https://laboursolidarity.org


Retraitée d’Orange, militante de SUD PTT, Verveine Angeli a été membre du Secrétariat national de l’Union syndicale Solidaires de 2014 à 2020. Active dans les Convois syndicaux vers la Bosnie, la Tchéchénie, elle a participé cette année à deux convois vers l’Ukraine. Membre d’ATTAC-France, elle est aussi active au sein de la Fédération des associations de solidarité avec tou∙te∙s les immigré∙e∙s.
Programmeur informatique durant 15 ans, puis expert en protection des données personnelles, et maintenant en reconversion vers le transport de marchandises à la voile, Baptiste Larvol-Simon est membre du Bureau de Solidaires Informatique. Activiste du climat et des biens communs (graines, logiciels libres, eau), il a déjà organisé et participé à deux convois vers l’Ukraine et depuis son retour il est particulièrement mobilisé contre les méga-bassines.


Kryvyi Rih, ville de mines, ville ouvrière [Solidaires]

Le matériel amené avec nous

Ce convoi a amené des délégué∙es de nos organisations, et apporté du matériel aussi divers que des groupes électrogènes, des moyens de télécommunication comme des talkies-walkies de qualité presque militaire ou des ordinateurs portables, du matériel de soin d’urgence (garrots, pansements hémostatiques, …), des produits d’hygiène féminine et infantile et des produits alimentaires, des équipements contre le froid (sacs de couchages et vêtements thermiques), des équipements d’autodéfense civile à la demande spécifique des femmes, etc. Il s’agissait de répondre à la liste des besoins exprimés par nos contacts syndicaux sur place. Tous ce matériel a été acheté grâce aux dons des syndicats et des personnes mobilisées pour cette solidarité. Nous avons aussi transporté les produits alimentaires et d’hygiène d’une association de la région parisienne et du matériel à destination de jeunes soldats engagés volontaires, achetés en France à la demande d’une militante syndicale dont le fils est soldat aujourd’hui. 20 000 euros de collecte réalisée en France sur le compte du Convoi syndical sont ainsi arrivés en direct à Kryvyi Rih.


La délégation et le fourgon avec des camarades ukrainien·nes : Solidaires, IP de Pologne, la CSP Conlutas du Brésil, ADL Cobas d’Italie, Cobas de l’Etat espagnol, Emancipation de France. Et le drapeau des camarade du syndicat indépendant des mineurs de Kryvyi Rih. [Solidaires]

L’engagement des militant·es polonais·es

Nos camarades polonais·es d’Inicjatywa Pracownicza [1] (IP) ont été particulièrement présent·es dans la préparation et l’organisation du convoi : transports, traductions, passages de frontières et autres aspects logistiques n’auraient pas pu se faire aussi bien sans eux et elles. Ielles ont mobilisé des ressources multiples, dont notre chauffeur du fourgon, ancien militant de Solidarnosc dans les années 1980, toujours engagé pour la justice sociale et la liberté, en particulier sur la frontière avec l’Ukraine. Il faut dire que la Pologne est aux premières loges de la guerre en Ukraine, avec de très nombreux·ses réfugié·es et des aller-retours où on voit des femmes et des enfants qui, par centaines, passent la frontière entre refuge dans un sens et besoin de voir leur famille dans l’autre. Les conséquences économiques de la guerre aussi sont nombreuses : en Pologne, de très nombreuses personnes se chauffent au charbon. Celui-ci vaut aujourd’hui 1000 euros la tonne, et il en faut trois, en moyenne, pour passer l’hiver. Alors, certain·es fabriquent du faux charbon avec des pierres peintes en noir et essayent de les écouler à des acheteurs malheureux… Les camarades d’IP avaient organisé une conférence la veille de notre départ vers l’Ukraine : lutte contre l’entreprise Amazon, entreprise dans laquelle ielles sont particulièrement actif·ves, solidarité avec l’Ukraine, défense des droits des travailleur·euses dans nos pays, avec la présence à distance des camarades Ukrainien·nes que nous allions rencontrer.

Les travailleurs et travailleuses impliqué·es. En cette fin septembre, nous avons rendez-vous avec le syndicat indépendant des mineurs à Kryvyi Rih, en réalité une union syndicale interprofessionnelle locale, regroupant des mineurs, des sidérurgistes, des conducteurs et conductrices de trains, des enseignant⋅es, du personnel du médico-social, etc. Ce sont environ 2 000 personnes qui sont touchées à travers les organisations que nous rencontrons. En Ukraine, comme dans la plupart des guerres, la classe ouvrière est en première ligne. Et c’est assez logique. Qui mieux que nous sait creuser des tranchées, manier des explosifs, conduire des trains, sécuriser des infrastructures numériques, conduire des camions ? Ce sont ainsi les travailleur·euses qui sont les plus mis·es à contribution dans cette guerre : humainement, financièrement, émotionnellement, juridiquement. Ce sont les enfants des militant·es syndicaux ou les militant·es eux·elles-mêmes qui sont en première ligne, pour défendre leurs villes.

Parce que les hommes sont majoritaires au front, et comme probablement dans toutes les guerres, les femmes prennent de plus en plus de responsabilités syndicales et populaires, dans l’organisation des travailleur·euses, ou dans la société ; elles prennent aussi en charge la solidarité en temps de pénurie. Cette place majeure aura nécessairement un impact sur l’encapacitation de toutes à la sortie de la guerre. Pour autant, il serait réducteur de croire que le rôle des femmes se cantonne à l’arrière-pays. On les retrouve également en première ligne : snippers, saboteuses. Il se dit que 20% de cette armée est composée de femmes et nous en avons effectivement vues. Dans cette situation, le pays ne tiendrait pas sans les femmes.

« La guerre n’a pas un visage de femme » [2]

Les femmes paient un lourd tribut à l’agression russe. Ce sont également les femmes divorcées de soldats récemment mobilisés qui n’arrivent plus à toucher la pension alimentaire pour leurs enfants, l’engagement des pères bouleversant la situation administrative des familles : en Ukraine, habituellement, ce sont les employeurs qui versent directement les pensions alimentaires pour les enfants au parent qui en a la charge. Avec l’enrôlement, l’employeur du père change, et c’est alors à l’armée d’assurer ces pensions alimentaires. Mais pour ce faire, il faut suivre une procédure administrative spécifique. Mais comme faire quand elle oblige à faire signer un formulaire à un père qui est sur la ligne de front ? Toujours en charge des enfants, ce sont elles qui traversent le pays pour se réfugier à l’ouest de l’Ukraine ou à l’étranger et qui reviennent pour que les enfants voient leur père, remplissant les bus pendant de longues heures qui marquent l’éloignement des familles. Là aussi, les situations de ruptures familiales rendent les situations plus précaires pour se déplacer, traverser des frontières, avoir les bons papiers. Enfin, les femmes veulent se défendre. Elles nous l’ont demandé, et leur insistance nous a interpelé·es, pour recevoir des bombes lacrymogènes et des pistolets à impulsion électrique. Pour nous, contre les troupes russes, cela semblait dérisoire. Elles nous ont dit qu’elles ne voulaient pas subir ce que certaines avaient subi à Boutcha [3].

Une armée populaire

Ce que nous avons vu de cette armée à Kryvyi Rih, c’est une armée de proximité. Probablement la même que celle des autres villes proches du front. Les enrôlé⋅es sont affecté⋅es au plus proches de chez elleux. Deux intérêts à cela : l’attachement des soldats à la reconquête du terrain, et la capacité d’une rotation des effectifs en première ligne, avec un arrière-pays à proximité particulièrement réparateur humainement. Ainsi, les combattant·es et l’armée sont plus performant⋅es, permettant la progression sur l’envahisseur. Ce témoignage d’un camarade soldat est éloquent à ce sujet : il nous montre la photo d’un soldat Russe mort, enchaîné à du mobilier urbain avec son lance-roquettes. Quelle différence entre ce soldat loin de chez lui, enchaîné par sa hiérarchie et ceux et celles dont l’engagement est la défense de leur territoire de vie, de leurs proches et de leur travail !


Déchargement du matériel [Solidaires]

Dans cette armée du peuple, les travailleur·euses sont particulièrement apprécié·es : les mineurs savent manier des explosifs et creuser des tranchées, les ouvrier·es savent comment fabriquer des protections (des plaques de gilets pare-balles, dont ils et elles manquent terriblement), manier des tronçonneuses, les conducteurs de trains servent la logistique, les travailleur·euses du BTP ou de la route participent au transport de troupes ou de matériel, au génie, et à reconstruire les logements détruits dans les zones attaquées ou reconquises. Les syndicalistes sont très présent·es dans cette armée, signe d’un engagement populaire fort et d’un recrutement ciblant en premier lieu cette population, signe aussi de l’engagement syndical. Et c’est ainsi que des groupements entiers, des positions complètes de l’armée Ukrainienne, sont marqués par une présence massive de travailleur·euses, qui plus est habitué⋅es à s’organiser efficacement entre eux et elles. Nous témoignons donc là d’une armée populaire, tissée directement dans la population pour la défense de ses lieux de vie. Ces soldats-travailleurs·euses ont peu de moyens, leurs familles, leurs frères et sœurs de luttes resté∙es en arrière s’organisent pour les aider : c’est pour eux qu’on nous demande des vêtements chauds et solides, des moyens de communication, des moyens de protection et de soins… C’est ce que nous avons essayé d’amener avec nous, dans la mesure de nos capacités.

La guerre lointaine et très présente

Notre convoi syndical de solidarité a donc débarqué en ce début d’automne à Kryvyi Rih, pour partie par les transports en commun et pour partie via un fourgon rempli au millimètre par les logisticiens de Solidaires, tout ceci sous couvert d’une organisation générale huilée par nos camarades Ukrainiens et Polonais, qui avaient aussi acheté du matériel en Pologne. Kryvyi Rih est une ville minière du centre-sud de l’Ukraine, constituée d’une conurbation de communautés de mineurs regroupés autour de leurs mines de fer. Nous sommes là hors de portée des tirs les plus communs d’artillerie (20km), mais l’armée russe sait frapper en profondeur… et elle le fera peu après notre départ. L’anticipation des risques est difficile pour ce genre de voyage et plusieurs discussions avaient eu lieu en amont avec nos camarades ukrainiens et ukrainiennes, pour qu’ielles nous disent ce qu’ielles estimaient être la situation sur place. Nous étions en confiance en partant, ce qui ne veut pas dire sans crainte, et cela s’est justifié sur place.


Cheminots ukrainiens récupérant des talkies-walkies livrés par le convoi. [Solidaires]

En effet, la vie fonctionne en Ukraine libre, malgré la guerre. Les gens vont au café, travaillent dès que cela est possible, continuent de faire des enfants et maintiennent le plus de normalité possible dans leur vie quotidienne. Pour autant les écoles ne fonctionnent à Kryvyi Rih qu’à distance, pire qu’un long Covid dont on a vu chez nous les effets dévastateurs sur les enfants. Et tous les soirs, c’est un couvre-feu strict de 22h à 6h qui est appliqué : les rues sont désertes, il n’y a plus âme qui vive que derrière les portes soigneusement fermées des habitations. En effet, les sirènes sifflent régulièrement, de jour comme de nuit, à Kryvyi Rih. Qui a l’oreille entraînée reconnaîtra, non un train qui passe au loin mais le sifflement des bombes russes passant au-dessus de la ville. Les rideaux sont systématiquement tirés et l’éclairage public éteint. Pas question d’offrir des repères à l’ennemi. Mais la vie continue. Demain matin, la voisine promènera sont vieux chien boiteux, comme d’habitude, pendant que son fils se connectera à l’école à distance, en attendant que le mari revienne du front pour une permission. Et une fois rentré·es en sécurité (relative) chez nous, nous nous surprendrons à ressentir une certaine pression dans la poitrine à entendre la sirène conventionnelle du premier mercredi du mois, avec une pensée forte vers l’autre bout de l’Europe.

Après avoir suivi la guerre pendant 7 mois depuis la France, nous nous attendions à témoigner davantage matériellement de celle-ci. A l’aller, ce n’est qu’en banlieue ouest de Kyiv, en entrant dans Boutcha et en évitant Irpin, sur la route, que nous constatons un pont totalement détruit, un autre dans le même état en cours de reconstruction, plusieurs stations-service ayant subi d’importants dommages, et des immeubles bombardés. Voici les seules marques architecturales que le feu de la guerre aura laissé sur notre route. Mais tout au long de notre périple en fourgon et en bus par Kyiv à l’aller et par Lviv au retour, les checkpoints en entrée de villes nous rappellent l’état du pays. Et encore, on ne nous y contrôle réellement qu’une seule fois.

Les personnes vivent-elles dans la peur ?

Alors ? C’est une question que nous nous sommes posée à plusieurs reprises. Les sirènes qui s’entendent plusieurs fois par jour semblent être sans effet dans la rue, même si le couvre-feu est scrupuleusement respecté et si un bruit un peu plus fort peut faire sursauter. Alors qu’est ce qui fait peur : Boutcha, nous ont dit les femmes. Même si l’ennemi est en difficulté, la peur de voir des soldats russes dans la ville a amené nos interlocutrices à vouloir s’armer de moyens d’autodéfense. Ce qui fait peu, c’est aussi le nucléaire. La centrale de Zaporizhzhia est distante d’un peu plus de 100 km. Le chantage qu’exerce l’armée russe sur celle-ci fait craindre l’accident, volontaire ou non, comme la présence de l’armée russe autour de Tchernobyl au début de la guerre. Les déclarations de Poutine, renforcées par celles de Kadirov (« Chef de la République tchétchène », sous domination russe), mettent aussi la question de l’utilisation d’armes nucléaires tactiques dans les risques. Nos interlocuteur·trices ont indiqué que la population était démunie de pastilles d’iode actuellement.

Livraison du matériel

Le convoi syndical a donc livré comme convenu les biens demandés par nos camarades, dûment collectés, rassemblés et transportés à travers l’Europe et dans la diagonale ukrainienne, jusqu’à un lieu secret, tenu par des soldats et avec des syndicalistes en uniforme de l’armée, autorisés à porter leur propres « symbolique » sur leurs vêtements militaires. Certains se feront photographier avec les drapeaux des syndicats présents. L’impression est étrange. L’utilité de nos apports est certaine, même si les différences culturelles et les barrières de langue rendent la compréhension immédiate difficile. Alors, quand l’émotion de nos hôtes est palpable, on se dit que l’objectif est nécessairement atteint. La délégation était composée de camarades du Brésil de la CSP Conlutas, d’Italie d’ADL Cobas, de l’Etat espagnol des Cobas, de Pologne d’IP, de France d’Emancipation et de l’Union syndicale Solidaires. Nous sommes venu·es de ces pays, certains des camarades ont traversé l’Atlantique pour apporter tout cela. Cela renforce sans doute aucun l’impact de ces dons. Et nous rentrons convaincu·es de l’intérêt de ce type d’action concrète qui mêle aide matérielle et solidarité militante directe.

Kryvyi Rih est une ville du centre-sud de l’Ukraine, située sur la rivière Inhoulets et peuplée de 650.000 habitant∙es en 2021. Elle se trouve à 120km environ au Nord-Est de Kherson et à l’Ouest de Zaporizhzhia, à 50km au Nord de la ligne de front (au moment où nous y étions), 9 heures de bus de Kyiv (au Sud-Est, à 400km). C’est une ville construite autour de ses mines, suivant un filon particulièrement riche en minerai de fer, sur un axe globalement Nord-Sud ; une ville à forte tradition ouvrière et de lutte [6].


Carte reprenant le découpage lié à la ligne de front, aux zones reconquises, et aux zones occupées, en fonction des informations disponibles, au 9 octobre 2022. [DR]

Lutte contre l’envahisseur et lutte des travailleur·euses

En prenant le temps d’écouter le témoignage de ce mineur réintégré après un jugement en sa faveur pour discrimination syndicale, et alors que le nouveau droit du travail a permis à son employeur d’amender son contrat de travail sans négociation, pour le ramener à 1h par mois ; celui de cette meneuse syndicale qui sort tout juste de sa brigade de nuit et qui ne perd pourtant pas une miette d’énergie dans son témoignage ; de cette juriste qui est sur le pont sans fléchir pour réussir à monter tous les dossiers des travailleur·euses qu’elle défend, quand les réformes de Zelinsky ont ramené la durée de prescription à 3 mois dans le Code du travail ; de cette comptable d’un syndicat qui est devenue n°1 car le président est au front ; de cette mère de famille debout, la tête haute, avec son fils en permission mais encore en tenue de soldat à ses côtés dans notre réunion ; de ces enseignantes qui se battent pour maintenir le niveau de scolarisation des enfants de Kryvyi Rih ; de ce local dont le chauffage a été coupé par les autorités municipales, faute d’avoir réussi à en chasser le syndicat et où la température a pu descendre à -9°c l’hiver dernier et dont le couloir d’accès est vidéo-surveillé par les institutions en guise de rappel… nous prenons la mesure des réalités que vivent nos camarades. D’ailleurs, un des militant présent le dit « avant c’était déjà la guerre », lors d’une précédente grève, « ils nous ont envoyé un groupe de 60 Russes pour nous remettre au pas ».

Nos camarades de Kryvyi Rih ont dénoncé les changements des lois sur le travail : dans les négociations collectives, les modifications permettant de ne plus consulter les syndicats sur les licenciements, la fin des contrats, les conditions de travail, la possibilité pour les employeurs de mettre fin unilatéralement aux accords collectifs. Ielles ont évoqué l’augmentation de l’âge de la retraite… Et il y a aussi des conditions spécifiques liées la guerre : la garantie de paiement des salaires qui passe à trois mois, l’arrêt de la prise en charge des salaires par les entreprises en chômage technique, diminuant les rémunérations aux stricts minima sociaux. Un intervenant cheminot a longuement décrit les conditions de travail difficiles des conducteurs, en lien avec la vétusté des trains et les conditions climatiques (+50°c en été, -20°c en hiver dans les cabines de conduite). Les cheminot∙es voient toutes sortes de droits s’éloigner, dans leur travail comme pour les congés ou les retraites.


Discussions informelles et promenade avant le couvre-feu : où on nous raconte la vie des cosaques, la vie et le combat de Makhno et Maroussia, la naissance de Trotski dans la région, et toujours les expériences syndicales, la lutte contre les pouvoirs et la corruption. [Solidaires]

Ils et elles se battent pour leur liberté immédiate, et cela est déjà bien suffisant. Mais qui plus est, leur combat aura des répercussions immédiates chez nous, leurs voisin∙es. Car Amazon et les autres outils du capitalisme y délocaliseront nécessairement leurs activités dès que l’opportunité se présentera, poursuivant leur travail de sape déjà entamé par la délocalisation des activités d’Allemagne vers la Pologne, pour casser les syndicats allemands et leurs revendications légitimes, pour niveler par le bas les droits sociaux et optimiser leurs profits.

Dans leur combat, c’est aussi le droit à l’autodétermination des peuples qui se joue, et par extension une victoire contre l’autoritarisme incarné par un Poutine et une oligarchie va-t-en-guerre qui veut mettre l’Ukraine au pas comme il met les femmes aux fourneaux. C’est le combat d’une aspiration à la liberté versus une logique de domination coloniale. Et de l’issue de ce combat dépend la forme que prendront nos sociétés, et ce de la Russie au Brésil. L’enjeu est grand pour nous toustes.

Un réseau internationaliste en action

C’est donc grâce au Réseau syndical international de solidarité et de luttes que ce convoi a été préparé et mené à destination. Ce Réseau regroupe des syndicats de base, indépendants, en lutte pour une transformation sociale radicale, prêts à entendre la complexité de cette situation de guerre, et à intervenir de manière différente de notre engagement syndical habituel, en soutenant des organisations syndicales impliquées nécessairement dans la guerre. Solidaires et le Réseau syndical international de solidarité et de luttes sont parmi les seules organisations ouvrières laissant l’appréciation de ce qui sert ou dessert la classe ouvrière d’Ukraine aux premiers et premières concerné∙es aujourd’hui, en acceptant ce niveau et ce type d’engagement. Et cela fait toute la différence avec un engagement de type ONG ou le positionnement de commentateurs et commentatrices que préfèrent tenir ceux et celles, y compris dans le mouvement ouvrier, qui refusent la solidarité avec les Ukrainien·nes sur des positions de principe soi-disant anti-impérialistes ou pacifistes.  A partir des retours particulièrement positifs de nos camarades de la KVPU de Kryvyi Rih [4], nous pensons déjà au 3ème convoi, et aux modalités de celui-ci. Nous aurons nécessairement besoin de moyens matériels et financiers. Les dons sont toujours nécessaires par un virement bancaire [5] C’est ensemble que ce combat contre les impérialismes et la violence autoritaire pourra être gagné.
Geroyam Slava
(Gloire aux héros de l’Ukraine)


⬛ Baptiste Larvol-Simon et Verveine Angeli


[1] IP : Initiative des travailleurs, organisation anarchosyndicaliste, membre du Réseau syndical international de solidarité et de luttes. ozzip.pl

[2]    Allusion au titre du livre de Svetlana Alexievitch, écrivaine du Belarus, prix Nobel de littérature.

[3]    Gros village de la banlieue ouest de Kiev où des exactions et des massacres de civil·es ont été découverts lors de la reconquête par l’armée ukrainienne.

[4]      https://kvpu.org.ua/uk/news/5/5517-novyi-profspilkovyi-konvoi-v-ukrainu

[5] Convoi syndical : FR12 2004 1000 0127 9649 6A02 006 – PSSTFRPPPAR. La Banque postale Centre financier Paris.

[6] Voir à ce sujet : « Hégémonie industrielle et économie morale dans une ville sidérurgique ukrainienne » www.cairn.info/publications-de-Denys-Gorbach–724991.htm

Les derniers articles par Patrick (tout voir)

Partagez cet article